28 juillet 2021
Par : Marie-Christine Drouin

Reconnaissance au travail : De nombreux bénéfices sur la santé globale et le bonheur professionnel

Pandémie et santé mentale : quelques statistiques

Bien au-delà d’une mode, la reconnaissance au travail s’avère de plus en plus un levier incontournable pour les organisations dans un contexte de guerre des talents sans précédent, qui menace parfois leur survie. La pandémie mondiale en a probablement multiplié l’importance de la reconnaissance. Parmi les nombreux impacts de la pandémie sur les travailleurs, la santé mentale et l’engagement de ceux-ci ont été affectés de façon très significative :

  • 45 % des individus se sentent seuls depuis le début de la pandémie ;
  • 56 % déclarent avoir perdu leur sentiment de contrôle ;
  • 56 % rapportent une augmentation de l’anxiété ;
  • 35 % signalent une augmentation de la dépression (Powell, 2020).

En considérant que la Norme nationale du Canada sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail intègre la reconnaissance parmi les 13 facteurs organisationnels ayant un impact sur la santé de l’organisation et celle des employés, il devient d’autant plus important (pour ne pas dire urgent) de s’en préoccuper sérieusement.

Les différentes recherches qui se sont intéressées de près à la reconnaissance au travail permettent de mettre en évidence ses bénéfices, à la fois nombreux et variés. Ceux-ci peuvent être regroupés en trois grandes catégories, soit 1) la santé mentale des employés, 2) la santé physique des employés et 3) la santé de l’organisation.

Reconnaissance et santé mentale des employés

Mouvement Santé mentale Québec considère la reconnaissance comme étant un facteur de protection et de développement. En effet, si l’identité personnelle (ex. : l’état civil, le genre) est importante pour plusieurs, l’identité professionnelle l’est tout autant. Or, celle-ci passe entre autres par la reconnaissance. Lorsqu’elle est faite de façon justifiée, sincère et opportune, la reconnaissance protège la santé mentale pour les raisons suivantes (Benjamin, 2007) :

  • Permet de construire, préserver et rehausser l’estime des employés ;
  • Leur donne le sentiment d’être appréciés et favorise le développement du bien-être professionnel ;
  • Les aide à résister au stress et à surmonter les situations professionnelles difficiles;
  • Facilite les relations professionnelles ;
  • Donne un sens au travail et contribue à augmenter la motivation, la satisfaction et le plaisir au travail ;
  • Leur donne la force d’entreprendre et de persévérer dans des projets ;
  • Motive et suscite un désir d’excellence ;
  • Encourage à se dépasser et à dépasser les attentes de l’organisation.

À l’inverse, une reconnaissance déficiente peut induire aux employés un sentiment de ne pas être appréciés pour leur contribution, une perte éventuelle de confiance en leur capacité à effectuer le travail et un niveau de rendement inférieur.

Reconnaissance et santé physique des employés

Outre les liens évidents entre la reconnaissance et la santé mentale des employés, certaines recherches scientifiques ont permis de préciser les bénéfices de la reconnaissance sur la santé physique des employés. Par exemple, bien avant la pandémie déjà, une étude britannique publiée en 2007 dans le Journal of Epidemiology and Community Health démontrait qu’un manque très important de reconnaissance au travail pouvait augmenter jusqu’à 1,7 fois le risque de maladie cardiovasculaire et jusqu’à 1,9 fois le risque de détresse psychologique (Vogli, Ferri et al, 2007).

Selon le Journal of Positive Psychology, des recherches démontrent qu’en plus des conséquences bénéfiques sur le moral et la productivité, recevoir régulièrement une rétroaction positive sur la qualité de son travail favoriserait un meilleur sommeil, réduirait les maux de tête ainsi que les autres symptômes physiques liés au stress, et encouragerait une alimentation plus saine (Starkey, Mohr, Cadiz & Sinclair, 2019). Un déséquilibre entre la prestation de travail et la reconnaissance reçue contribuerait également à l’épuisement professionnel, avec tout ce qu’il implique en coûts directs et indirects.

Reconnaissance et santé organisationnelle

Les impacts organisationnels de la reconnaissance sont évidents et découlent directement des bénéfices sur la santé des employés. À l’échelle de l’entreprise, la reconnaissance (Benjamin, 2007; Brassard, 2007) :

  • Favorise la mobilisation, l’engagement et la fidélisation des employés ;
  • Améliore la qualité de vie, l’ambiance et le bien-être au travail ;
  • Facilite la collaboration entre les personnes ;
  • Renforce l’esprit d’équipe et le sentiment d’appartenance (lorsque la reconnaissance est faite en groupe) ;
  • Favorise l’efficacité et la productivité ;
  • Facilite l’atteinte des résultats ;
  • Contribue à une marque employeur positive, à la culture et aux valeurs de l’entreprise ;
  • Favorise l’attraction des meilleurs talents.

En envisageant les effets inverses de l’absence ou de la faible reconnaissance, il est à se demander si une seule entreprise, avec la guerre des talents que l’on connaît en 2021, peut se permettre d’être négligente à cet égard !

Reconnaissance et bonheur au travail

De plus en plus de recherches s’intéressent au bonheur au travail, considéré comme rentable pour les entreprises et la société. Selon l’Indice de bonheur Léger au travail (IBL-T), qui mesure le niveau de bonheur lié au travail, les Québécois ne figurent pas encore parmi les plus heureux au boulot (Poiré, 2019). Il reste donc du chemin à faire !

En considérant que le salarié moyen passera 40 ans ou quelque 75 000 heures sur son lieu de travail, il s’avère que, si celles-ci ne sont pas majoritairement positives, elles influencent forcément le niveau de bonheur personnel et la performance d’une organisation, potentiellement sur une longue période, fait valoir le président et fondateur de l’Indice, Pierre Côté. Le bonheur au travail semble le nouvel incontournable de l’entreprise faste.

L’IBL-T s’appuie sur six facteurs : la réalisation de soi, les relations de travail, la reconnaissance, la responsabilisation, la rémunération et le sentiment d’appartenance. La reconnaissance fait donc partie des principaux facteurs du bonheur au travail, elle-même reliée à d’autres facteurs, dont le sentiment d’appartenance. L’IBL-T évalue également huit grandes dimensions : l’ouverture, la civilité, l’organisation du travail, la collaboration, l’équité, l’avancement, le dynamisme et la conciliation travail-vie personnelle. Or, on sait que la reconnaissance favorise en elle-même certaines de ces dimensions, dont la collaboration.

Conclusion

La reconnaissance au travail n’a rien de banal. Considérant ses multiples bénéfices sur la santé des employés, celle des organisations et même le bonheur professionnel, elle s’avère une pratique incontournable. Aucune organisation ne peut se permettre de la prendre à la légère ! Alors qu’elle peut donner l’impression d’exiger de la part de l’employeur des efforts extravagants, c’est plutôt le contraire. Il existe différents types de reconnaissance, en toute simplicité, que le télétravail généralisé n’empêche aucunement. Pour en savoir davantage sur les différentes approches de la reconnaissance, je vous réfère à l’article de blogue de mon collègue Éric Donahue.

 
Marie-Christine Drouin, M.Ps.

Leader – Évaluation des talents, Psychologue I/O, Coach

Références

Benjamin, J. (2007). La reconnaissance en milieu de travail, Bulletin La vitrine – On connaît vos besoins en détail.  Hiver 2007, vol. 3, no4.

Brassard, N. (2007). La gestion de la reconnaissance – Une obligation ou une nécessité.

Poiré, A-S. (2019). Le bonheur au travail, le nouvel incontournable. Cahier spécial Monde du travail, Le Devoir.

Powell, A. (2020). Disruption of work relationships adds to mental-health concerns during

pandemic. Récupéré le 31 mars de: https://news.harvard.edu/gazette/story/2020/09/disruption-of-work-relationships-adds-to-mental-health-concern/

Starkey, A.R., Mohr, C.D., Cadiz, D. M., Sinclair, R.R., Pages 779-788 | Received 14 Apr 2018, Accepted 08 Dec 2018, Published online: 14 Feb 2019

Vogli, R. D., Ferrie, J.E. et al. (2007). Unfairness and Health: Evidence from the Whitehall II StudyJournal of Epidemiology and Community Health. 61: 513-518.