Voyez comment les personnages de Star Wars démontrent les styles de leadership
Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine, les principales figures de proue impliquées dans le conflit opposant l’Empire galactique et l’Alliance rebelle avaient à mobiliser les forces et les ressources à leur disposition afin d’atteindre leurs objectifs. La façon dont ces personnages clés se sont acquittés de leurs responsabilités illustre d’ailleurs bien les différents archétypes qu’il est possible de retrouver chez les leaders formels et informels de nos organisations contemporaines. C’est dans ce contexte que les paragraphes suivants proposent de décortiquer les styles et caractéristiques du leadership démontré par certains de ces personnages, de même que les différentes situations pour lesquelles ces styles sont appropriés… ou non!
Le dirigeant autoritaire (Dark Vador)
Même si l’on fait abstraction du fait que Dark Vador représente l’incarnation même du mal, l’approche qu’adopte ce personnage a pour effet de centraliser le pouvoir décisionnel entre ses mains. On le voit à plusieurs reprises donner des ordres directs à ses subalternes en faisant allusion aux conséquences léthales d’une absence de coopération ou d’un manque de compétence avec lui. Il n’hésite d’ailleurs pas à mettre ses menaces à exécution auprès d’officiers de l’Empire, autant pour punir que pour s’assurer de l’obéissance des autres.
Lorsque l’on étudie sa façon de diriger les autres, il semble évident que le volet transactionnel de son leadership est fort développé, avec un accent sur le renforcement, sur la hiérarchie et sur la discipline, mais il en est tout autrement du volet transformationnel. En effet, le personnage et son style de leadership autoritaire ne font que bien peu pour développer les personnes de son entourage et on ira même jusqu’à constater que Vador n’a ni apprenti, ni amis tout au long des films au sein desquels il apparait.
Si tous les dirigeants autoritaires n’embrassent pas aussi clairement le côté obscur, il semblerait que les résultats obtenus soient souvent comparables. Ce style permet en effet, lorsque l’on travaille avec des ressources efficaces et compétentes, de réaliser de grandes choses. Il produit néanmoins une motivation qui est presque exclusivement extrinsèque et donc de moins bonne qualité, tout en n’offrant ni la latitude d’action, ni le soutien ou les opportunités de développement qui permettraient aux subalternes de contribuer pleinement aux projets. Qui sait… avec un style de leadership un peu moins autoritaire, Vador aurait peut-être réussi à écraser l’Alliance!
Le leadership démocratique (Yoda)
Se positionnant à toutes fins pratiques à l’opposé de l’exemple précédent, la façon dont se comporte Yoda en tant que Grand Maître de l’Ordre Jedi avec les membres de son Haut Conseil, représente un second exemple d’archétype de leadership qui est ici qualifié de démocratique. En effet, malgré toutes ses qualités et l’influence qu’il possède, Yoda préfère consulter et guider les autres plutôt que de donner des directives. On le constate notamment lorsqu’il permet qu’Anakin soit formé malgré ses réserves.
Ce style de leadership permet de mettre sur pied une certaine transparence au niveau des échanges, ce qui permet ensuite de soutenir et de favoriser le développement des membres de son équipe. S’appuyant davantage sur un style transformationnel où le développement de l’humain et la responsabilisation sont favorisés en agissant comme un modèle, en favorisant l’émergence d’une vision commune et en agissant à titre de coach, le leadership démocratique permet de développer les individus pour qu’ils soient ensuite en mesure d’assumer une importante part de responsabilités. Il favorise d’ailleurs le développement de sentiments d’appartenance, de compétence et d’autonomie qui sont centraux pour l’apparition d’une motivation autonome chez les collaborateurs (Decy et Ryan, 1985; Forest et al., 2022).
Les histoires qui se sont déroulées dans cette lointaine galaxie nous démontrent que le style démocratique de Yoda est tout à fait adapté lorsqu’appliqué aux individus d’exception que sont les Jedi. Par contre, on constate également que, lorsqu’exercé de façon excessive, il n’a pas permis de prendre certaines décisions difficiles et pourtant nécessaires (comme de ne pas former Anakin) et qu’il n’aurait pas eu la même efficacité si les Maîtres Jedi avaient été moins compétents et dévoués.
Le leadership paternaliste (Obi-Wan Kenobi)
Autant avec Anakin qu’avec Luke, le type de leadership sur lequel s’appuie Obi-Wan Kenobi peut être qualifié de paternaliste. Il démontre à plusieurs reprises qu’il considère ses apprentis comme des membres de sa famille et tente en ce sens de favoriser leur développement tout en les protégeant d’eux-mêmes. Pour y arriver, le Maître Jedi a tendance à leur imposer ses orientations puis à persuader ces derniers du bien-fondé de ses décisions tout en déterminant lui-même ce à quoi sont prêts ou non ses protégés.
Le style paternaliste emprunte ainsi certains éléments au style autoritaire en ce sens que le leader considère que ses approches et sa vision sont les bonnes et que les autres devraient suivre celles-ci. L’approche et les motivations sont toutefois bien différentes puisque cette façon de fonctionner est ici adoptée dans un objectif de favoriser la croissance et la réussite des membres de l’équipe plutôt que de se concentrer uniquement sur l’atteinte de ses propres objectifs. En s’appuyant à la fois sur les outils transactionnels qui permettent de soutenir la performance et de diriger le travail à accomplir, ainsi que sur les outils transformationnels qui permettent de favoriser une certaine croissance des individus, ce style vise à permettre à tous de suivre les orientations du leader paternaliste sans égard à leur niveau de compétence ou d’autonomie.
En tant que leader, ce style permet à Obi-Wan de guider ses apprentis dans la direction qu’il juge adéquate. On constate toutefois que ce style s’appuie de façon prépondérante sur sa capacité de jugement, qui elle peut s’avérer faussée en raison des liens émotionnels développés justement en exerçant ce style de leadership. Un leader paternaliste doit donc s’assurer de demeurer vigilant, d’avoir une bonne lecture des situations qui évoluent autour de lui et de maintenir une bonne capacité de jugement, sous peine de guider son équipe dans la mauvaise direction. On voit d’ailleurs que certaines des erreurs de jugement d’Obi-Wan, lorsqu’il a été question d’Anakin, ont été particulièrement dommageables à une échelle galactique…
Le laissez-faire (Han Solo)
Bien qu’il soit facile de l’oublier, étant donné ses comportements et l’approche généralement nonchalante qu’il a vis-à-vis ses responsabilités, Han Solo a été promu au grade de Général de l’Alliance à la suite de son implication dans la destruction de la première Étoile de la mort. Ardent défenseur du « vivre et laisser vivre », ce personnage évite généralement de donner des instructions ou d’imposer sa façon de voir les choses aux autres. Il s’agit d’un excellent exemple de personnage qui n’assume tout simplement pas sa fonction de leader, qui « laisse faire » ses collaborateurs et qui obtient pourtant un certain succès.
L’exemple est particulièrement révélateur lorsqu’on regarde la relation qu’il a avec Chewbacca. Le Wookie est à la fois très compétent et très autonome, ce qui implique que l’absence de leadership assumé par Han n’est pas problématique. Il en serait toutefois autrement avec des collaborateurs qui ont besoin d’un certain encadrement pour fonctionner. C’est donc dire que les membres de l’équipe d’un leader adoptant un style axé sur le laissez-faire doivent, à toutes fins pratiques, être leurs propres leaders. Ils ne peuvent en effet pas compter sur l’adoption de comportements de soutien de la part du leader, qu’il soit question d’un encadrement à la tâche de nature plus transactionnelle, de ressources de nature transactionnelles qui favorisent la croissance, ou encore d’un encadrement favorisant l’émergence d’une motivation quelconque. L’adoption de ce style est donc généralement dommageable, à l’exception de ces situations où les collaborateurs n’ont pas vraiment besoin d’un leader.
En l’espèce, il n’est donc pas surprenant que Chewbacca, après s’être fait sauver la vie par Han et avoir juré de le suivre jusqu’à sa mort, soit le seul membre de son équipage. Considérant le rôle et l’influence qu’Han aurait facilement pu avoir au sein de l’Alliance, on pourrait même aller jusqu’à affirmer qu’il n’a pas adéquatement assumé ses responsabilités. S’il avait assumé son rôle de leader, il est fort probable que ce héro aurait pu avoir un impact beaucoup plus grand pour ses amis et la cause qu’il a choisi d’adopter.
Les styles de leadership
Les quatre exemples précédents illustrent particulièrement bien certaines formes que peut prendre le leadership, qui sont plus ou moins adaptées selon la situation. Ils permettent d’ailleurs de bien illustrer les conséquences positives et négatives de même que les risques qui sont associés à chacun. L’encadrement adéquat, favorisant l’émergence d’une motivation idéalement autonome, de même que l’utilisation judicieuse des penchants transformationnels et transactionnels du leadership selon les besoins des collaborateurs et de la situation, permettent ainsi d’avoir un impact positif sur le développement et les réalisations des collaborateurs. Un peu à l’image de la Force, le leadership représente un outil puissant, mais qui doit être utilisé et être adapté au contexte pour être efficace et permettre l’atteinte de bons résultats et dont le développement peut être soutenu à l’aide des ressources adéquates.