Bien que la gestion des talents soit présentement très à la mode, il n’existe pas de définition concise ou uniforme du talent ou de cette pratique de gestion (Morin, 2010). Nous vous proposons donc une série de quatre articles qui paraîtront sur le blogue d’EPSI dont le but sera d’éclairer les lecteurs sur ce thème, en statuant autant sur les avancées pratiques que scientifiques dans le domaine. D’abord, dans le premier article, le contexte dans lequel la gestion des talents émerge sera explicité et l’approche de gestion des talents sera présentée en fonction de sa définition et de ses objectifs. Dans le second article, les notions de talent et de potentiel, concepts clés, seront explorées. Le troisième article abordera plusieurs points cruciaux à prendre en considération lors de l’identification des employés à haut potentiel. Finalement, le quatrième article présentera une critique de l’approche et quelques commentaires des auteurs.
Contexte et définition de la gestion des talents
En 2001, le livre « The War for Talent » fait son apparition sur les tablettes des bibliothèques nord-américaines. Écrit par trois consultants de la firme américaine McKinsey & Company, ce livre jette les jalons d’une nouvelle approche de gestion : la gestion des talents (Silzer & Church, 2009). Cette nouvelle approche apparaît afin d’aider les organisations à s’adapter à la nouvelle réalité socio-économique mondiale (Michaels, Handfield-Jones & Axelrod, 2001).
Ancienne réalité | Nouvelle réalité |
Les personnes ont besoin des organisations. | Les organisations ont besoin des personnes. |
La technologie, les capitaux et la géographie sont des avantages concurrentiels. | Les employés talentueux sont les avantages concurrentiels. |
Les emplois sont rares. | Les individus talentueux sont rares. |
Les employés sont loyaux et les emplois sont sécuritaires. | Les employés sont mobiles et leur engagement est à court terme. |
Les employés acceptent les conditions qui leur sont offertes | Les employés demandent beaucoup plus. |
Compte tenu de ce nouveau contexte où les employés talentueux sont à la fois rares et constituent les avantages concurrentiels, Michaels, Handfield-Jones et Axelrod (2001) sont d’avis qu’une organisation doit adopter cinq incontournables pour se démarquer. Premièrement, l’organisation doit adopter une culture du talent à tous les niveaux de gestion. En d’autres mots, l’organisation doit a) avoir la conviction qu’une meilleure performance de l’entreprise passe par une meilleure gestion des employés talentueux; b) faire de la gestion des talents une priorité à l’intérieur de l’organisation et c) impliquer tous les niveaux de gestion dans la détection des employés talentueux (Boudreau & Ramstad, 2004). Deuxièmement, l’organisation se doit de développer une image de marque gagnante pour attirer les employés performants (Kim, 2008). Troisièmement, il est nécessaire, pour l’organisation, d’utiliser les meilleures pratiques au niveau du recrutement, de l’évaluation et de la sélection des « talents » afin d’être en mesure d’identifier adéquatement les personnes clés. Quatrièmement, il est essentiel d’offrir d’excellentes opportunités et de bons programmes de développement étant donné qu’il est nécessaire de favoriser pleinement le développement des individus talentueux. Cinquièmement, une organisation désirant instaurer une gestion des talents se doit de développer une structure de gestion des ressources humaines parallèle. Étant donné que les employés talentueux offrent un avantage concurrentiel à l’organisation, ces employés se doivent d’être traités différemment afin de les conserver au sein de l’organisation, notamment par de plus grandes opportunités de développement (Foucher, 2010). Ainsi, la gestion des talents est un ensemble intégré des processus, des programmes et des normes culturelles d’une organisation qui est implanté pour attirer, développer, intégrer et conserver les talents afin d’atteindre ses objectifs organisationnels et de répondre à ses futurs besoins (Silzer & Dowell, 2010).
Les employés et la gestion des talents
Selon l’approche de la gestion des talents, il existe trois types d’employés : A, B et C (Michaels et coll., 2001). Les employés sont classés selon leur potentiel à ajouter une valeur à l’organisation (Berger, 2004). Les tenants de cette approche affirment que la main-d’œuvre se doit d’être différenciée en considérant la contribution relative des membres à l’atteinte des objectifs stratégiques d’une organisation (Becker, Huselid & Beatty, 2009). En d’autres termes, tous les employés ne sont pas égaux et doivent, par conséquent être traités différemment. D’abord, les joueurs « A » sont les employés talentueux ou à haut potentiel (Lewis & Heckman, 2006). Ces derniers démontrent des réalisations supérieures, inspirent d’autres personnes à produire des résultats supérieurs et reflètent les valeurs et les compétences jugées centrales par l’organisation (Foucher, 2010; Reilly, 2008). Ensuite, les employés « B », que l’on retrouve en grande majorité à l’intérieur des entreprises, satisfont aux attentes de l’organisation (Foucher, 2010). Enfin, les joueurs « C » représentent les employés qui ne performent pas à la hauteur des attentes (Berger, 2004). Différents auteurs sont d’avis que plus une organisation possède d’employés talentueux, plus elle sera performante (Huselid, Beatty & Becker, 2005). Cependant, qu’est-ce qu’un employé talentueux? Qu’est-ce que le talent? C’est ce que nous verrons dans le prochain article de cette série.
Philippe Longpré, Ph.D. Cdt.
Marilyne Pigeon, Ph.D. Cdt.