L’engagement des employés : Comment avoir des joueurs d’équipe
L’enjeu
Un groupe d’employés, c’est comme une équipe sportive. Les meilleures équipes ne sont pas celles où figurent que des joueurs étoiles, mais bien celles où les personnes participantes sont engagées face aux objectifs de l’équipe. Avoir le talent, c’est une chose, exploiter son plein potentiel, c’en est une autre.
Malheureusement, l’engagement des employés est loin d’être un acquis pour la plupart des organisations. Selon un sondage de la firme Gallup en 2019, il ressort que plus de 85 % des personnes employées à l’échelle mondiale ne sont pas engagées ou qui sont fortement désengagées (Gallup, 2019). Voici une énumération de certaines conséquences qu’ont ces individus désengagés sur leur organisation :
- Diminution du bien-être des employés;
- Diminution de la rétention de personnel;
- Augmentation l’absentéisme;
- Diminution de la qualité du service à la clientèle;
- Etc.
Pour les technocrates qui souhaitent avoir un indicateur quantitatif, le manque d’engagement causerait une perte annuelle de 350 à 450 milliards de dollars ($US) aux entreprises états-uniennes (Alvino, 2014). Si l’engagement était un enjeu complexe auparavant, l’arrivée forcée du travail à distance dans nos pratiques ajoute une couche additionnelle à cette complexité.
La recette secrète de l’engagement des employés
S’il existait une recette secrète pour garantir l’engagement de vos employés, je peux vous garantir qu’elle ne serait plus secrète (et non, un gestionnaire qui offre une boite de Timbits à l’occasion pour encourager son équipe n’est pas la recette secrète.) Le vrai secret est que les pratiques d’excellence pour favoriser l’engagement peuvent varier d’une organisation à une autre. Ce qui fonctionne pour une équipe de travail pourrait ne pas fonctionner pour une autre équipe et ceci est tout à fait normal. Il est donc important de bien connaitre son équipe lorsque l’on met en place des pratiques d’engagement (dynamiques, relations interpersonnelles, motivations, objectifs, etc.).
Si certains préconisent les bienfaits des récompenses monétaires, d’autres estiment qu’elles sont inadaptées au contexte professionnel. Dans les faits, les récompenses sont efficaces, mais seulement à des moments précis. Si des gratifications monétaires sont promises tous les trimestres, elles deviennent invétérées dans l’esprit des employés et l’objectif d’améliorer l’engagement est détourné de son sens. Dans un scénario où les récompenses monétaires sont offertes de manière impromptue ou aléatoire, elles peuvent alors stimuler l’engagement. Si vous souhaitez conserver et engager votre équipe pour le long terme, vous aurez besoin d’une stratégie beaucoup plus élaborée.
Il existe deux catégories de motivation pour une personne : les motivations intrinsèques et celles extrinsèques. La première catégorie fait référence à la satisfaction des employés dans la réalisation de leur travail ainsi que la satisfaction qui en résulte (Roussel, 1996). Cette motivation est innée et assez stable chez l’individu. La deuxième catégorie est variable et conditionnée par les résultats. Selon une recherche du Institute of NeuroCognitivism (INC), la motivation intrinsèque est très solide et durable face à la motivation extrinsèque qui serait beaucoup plus fragile et éphémère.
Il est également pertinent de faire la différence entre satisfaction et engagement. Une personne employée satisfaite n’est pas nécessairement engagée et l’inverse est tout autant valide. Voici quelques caractéristiques de ces deux variantes :
Il existe un lien assez fort entre les deux catégories de motivation. Si la motivation intrinsèque fait défaut, la motivation extrinsèque risque de ne pas être efficace et vice versa. Cependant, l’organisation peut jouer un rôle important sur la motivation extrinsèque qui peut naturellement, influencer positivement ou négativement la motivation intrinsèque Voici quelques aspects pouvant favoriser un engagement positif chez les employés :
1. Maintenir un environnement sain et stimulant.
Un environnement de travail engageant doit fournir une sécurité à l’employé (physique et psychologique) ainsi que promouvoir une énergie positive. Quant à un environnement physiquement sécuritaire, vous n’êtes pas sans savoir de son importance en milieu de travail. Cependant, la sécurité psychologique joue un rôle important et peut être plus complexe à assurer. Un employé en sécurité ne manquera pas de relever des défis en acceptant de se tromper sans pour autant manifester un sentiment d’infériorité, d’incompétence, de désagrément, etc. Les éléments de danger ici sont donc les autres membres qui interagissent avec l’employé. Un gestionnaire de qualité doit donc faire la preuve que les employés sont dans un environnement sécuritaire en les encourageant et en les défendant en situation d’échec. Les commentaires négatifs à l’endroit d’autres employés sont des freins importants à l’engagement et renforce l’enfermement sur soi.
En ce qui concerne la promotion d’énergie positive, voici une matrice très pertinente provenant de la publication de Peters en 2019 :
La majeure partie du temps, on souhaiterait que nos employés se situent dans le quadrant supérieur droit : Grande énergie positive (effort constant, persévérance, créativité, vouloir de collaborer, désir de fournir la qualité, etc.)
Toutefois, il n’est pas réaliste de vouloir que les employés se trouvent dans ce quadrant en permanence. Pour pouvoir performer longtemps dans ce quadrant, il est nécessaire de devoir avoir des moments ou l’énergie est moins présente. On peut donc retrouver nos employés dans le quadrant inférieur droit : Faible énergie positive (environnement calme, la paix est mise en valeur, les relations sont bonnes, etc.) Idéalement, un gestionnaire essaye de conserver ses employés dans le côté droit de la matrice.
Une grande énergie négative est caractérisée par des tensions et comportements irritables, des conflits réguliers, des compétitions malsaines, etc. Finalement, le quadrant de la faible énergie négative fait référence à des employés sceptiques, un manque de leadership, un manque de confiance, un sentiment d’abandon, etc.
L’environnement est une importante composante de l’engagement au travail. L’entreprise et ses gestionnaires doivent donc mettre en place les composantes pour favoriser la sécurité et l’énergie positive de ses employés.
2. Avoir des attentes claires et fournir le support nécessaire.
Les employés qui ne reçoivent pas des directives ou des demandes claires peuvent avoir plus d’inquiétudes en lien avec la prise de décisions. Le potentiel d’innovation diminue et le risque d’être démoraliser augmente. Une personne faisant une demande à un autre employé (que celui-ci soit un collègue ou non) devrait toujours faire montre de ses attentes de façon limpide et s’assurer que la personne concernée comprend de quoi il retourne. On peut penser au modèle SMART (Spécifiques, Mesurables, Acceptables, Réalistes et Temporellement définis).
Même si les demandes sont très claires, elles doivent être réalisables par la personne attitrée. Il est donc important de vérifier si 1 – la personne possède toutes les formations pour réaliser la tâche et 2 – les technologies et les systèmes en place permettent la réalisation de la demande. Si l’un de ces aspects n’est pas présent, l’employé risque de se démoraliser rapidement en essayant d’effectuer son travail. Consulter l’équipe de travail régulièrement pour vérifier si des formations sont nécessaires, si des processus peuvent être améliorés (optimisés) ou si l’équipe a toutes autres recommandations, peut favoriser leur engagement envers les objectifs de l’équipe.
Il faut également faire attention à la quantité de demandes que l’on fait. Même si nos demandes sont SMART, bombarder un employé surchargé de demandes ne favorisera pas l’engagement. Il est important de connaitre la capacité des membres de l’équipe et de s’assurer de la respecter.
3. Prendre le temps pour les employés et les accompagner dans leur développement.
Encore selon l’étude de la firme Gallup, le rôle du gestionnaire influence l’engagement des employés d’environ 70 %. Ce pourcentage peut sembler alarmant, mais j’aime plus le voir comme motivant. Par conséquent, un gestionnaire qui écoute et se montre attentif envers ses employés peut exercer une influence considérable sur leur engagement. Des discussions quotidiennes, que ce soit de courts appels pour s’assurer que la charge de l’employé est convenable ou simplement pour discuter, peuvent favoriser l’engagement. La clé pour que ces rencontres soient efficaces est la répétition. Ces appels ont un plus grand impact s’ils sont sur une base quotidienne que s’ils sont sur une base hebdomadaire. Ce ne sont pas tous les employés qui ont besoin de discuter régulièrement, donc il est nécessaire de connaitre les préférences de ceux-ci.
Au-delà des rencontres quotidiennes, il est important de discuter avec les employés de leur parcours professionnel. Je ne fais pas référence à des rencontres d’évaluation de performance, mais bien de discuter avec l’employé des occasions de formations/coaching qui seraient bénéfique à l’employé. En se fondant sur leurs objectifs futurs avec l’organisation, on peut accompagner l’employé vers ces objectifs. L’important au long terme n’est pas de recevoir une paye à chaque deux semaines, mais bien de s’épanouir dans ce que l’on fait à chaque jour. En tant que gestionnaire, il s’agit d’une responsabilité importante de prendre le pouls de son équipe régulièrement.
4. L’engagement à distance!
Difficile de parler de meilleures pratiques sans parler de la tendance de l’heure : le télétravail. Nous avons vu une arrivée accélérée de ce mode de travail et sa popularité semble indiquer que ce mode de travail devrait rester. Cette technologie permet à des employés de travailler complètement en télétravail en raison de la distance géographique qui les sépare du lieu de travail. Ces employés, dont le talent et l’importance pour l’organisation sont équivalents, se heurtent au défi singulier de l’isolement social. Que ce soit de rencontre des collègues au bureau ou de manquer des événements physiques, un sentiment de séparation peut se créer et influencer grandement sur le niveau d’engagement de ces employés. Pour maximiser l’expérience du télétravail, vous pouvez appliquer les pratiques suivantes :
- Porter attention aux tâches/projets qui semblent le plus intéresser ces employé.e.s et ceux qui semblent moins les interpeller. Si possible, ajuster la structure de travail pour mettre en valeur les intérêts et les forces des employés.
- Démontrer l’importance du travail réalisé avec les objectifs de l’organisation. Lorsque des résultats positifs sont atteints, ne pas hésiter à féliciter publiquement les employés et surtout identifier comment le service rendu créé de la valeur pour l’organisation.
Encourager les rencontres/activités sociales digitales pour favoriser la chimie au sein de l’équipe. Ceci peut permettre de créer des relations de travail qui peuvent améliorer l’expérience au travail pour les employés à distance. Plusieurs activités peuvent permettre de renforcer la chimie telles que : un Jeopardy en ligne, un quiz personnalisé sur Kahoot (kahoot.com), un rally maison, etc. Soyez créatifs tout en étant raisonnables; une activité par semaine peut devenir lourd pour plusieurs employés et même contre-productif.
Conclusion
En définitive, favoriser l’engagement des employés est un défi auquel personne n’échappe. Comme le mentionne les statistiques, la grande majorité des employés manquent d’engagement, chose qui entraine des effets néfastes sur l’organisation. Selon moi, l’engagement repose sur la régularité. Des petites pratiques/actions constantes garantiront, à terme, le succès que vous convoitez. Que ce soient des interventions, des attentions, des activités ou tout autre geste, il est important d’être conséquent. Les outils pour mettre en place l’engagement sont nombreux, il vous suffit de les trouver, les adapter et les utiliser. Finalement, entre vous et moi, une boiite de Timbits à l’occasion fait toujours bien au moral…
Références
Alvino, L. (2014, 29 septembre). Engage your employees or lose billions. Forbes Magazine. http://www.forbes.com/sites/womensmedia/2014/09/29/engage-your-employees-or-lose-billions/
Boulay, A., Robert, V. & Vandenberghe, C. (2021). Engagement envers les buts d’équipe et l’organisation : test d’un modèle intégrateur. Le travail humain, 84, 349-381. https://doi-org.proxybiblio.uqo.ca/10.3917/th.844.0349
Bourdon, I., & Bourdil, M. (2007). Récompenses et gestion des connaissances, des liens complexes ! La Revue Des Sciences De Gestion : Direction Et Gestion, 42(226), 165-171.
Gallup (2019). Employee engagement: Maximizing employee potential.https://www.gallup.com/workplace/267512/development-culture-engagement-paper-2019.aspx?thank-you-report-form=1
Mahamadou, Z., Fall, A. & Giraud, L. (2020). The impact of organizational culture on work performance: the mediating role of intrinsic motivation. Revue de gestion des ressources humaines, 118, 38-54.
Peters, J. (2019). Employee engagement : creating high positive energy at work (Ser. Talent management ser, v. 5). Knowledge Resources. Retrieved 2022
ROUSSEL, P. (1996). Rémunération, Motivation et Satisfaction au Travail, Economica, Paris.